Je te vois, ami lecteur, affichant une moue mi-dégoût mi-scepticisme à la découverte de ce titre énigmatique.
Pour ta gouverne, nous sommes à Windhoek, capitale de la Namibie, tel Valéry Giscard d’Estaing, qui lui n’y fait pas un spectacle mais va dégommer du pachyderme à la carabine, comme apparemment tous les ans. On espère le croiser pour lui dire tout le bien qu’on pense de ça. Et à Windhoek, ancienne colonie allemande dont l’urbanisme est orné d’artères telles « FranzShubertstrasse » mais aussi «Robert Mugabe Avenue », on s’embrasse sur la bouche. En famille, entre amis, entre hommes et entre femmes. Surtout quand on ne s’est pas vu depuis longtemps et qu’on est trèsheureux de se revoir. Ça fait tellement plaisir de revoir tante Greta, mais c’est vrai qu’elle pique un peu. Festival de smacks assurés dans les aéroports. Mais on ne met pas la langue. Ou alors c’est qu’on s’aime vraiment beaucoup.
Voilà pour une coutume locale qui risque de te surprendre, ami lecteur, si tu débarques de bon matin à Windhoek. Nous, nous sommes arrivés en début d’après-midi, et comme nous n’avions jamais mis les pieds en Namibie, on n’a pas eu l’occasion de retrouver quelqu’un qu’on aimait beaucoup ( même si on finira pas en quitter quelques-uns qu’on continuera d’aimer énormément ) et, donc, nous nous serrâmes la main avec juste ce qu’il faut de poigne chaste et modérée.
Windhoek est blond. Surtout dans le centre. Il y a des grands magasins pour la pêche et le camping, des centres commerciaux comme on n’en a pas vus depuis Vélizy 2 dans les années 80, et un quartier plein de baraques en tôles ondulées, où tout à coup Windhoek est beaucoup moins blond.
Tradition allemande oblige, nous donnerons le spectacle dans une ancienne fabrique de bière, et en habit traditionnel du Tyrol.
Le public est à l’image du breuvage jadis brassé : blond. Et aussi à l’image de notre continent : vieux. Surtout les premiers arrivants, car le spectacle est complet, et qu’on n’a plus 20 ans quand on craint de se retrouver sans place assise par une fraîche soirée d’automne dans un hangar industriel. Au final, nous réunirons toutes les tranches d’âge, et toutes les couleurs de peau, qui ne s’embrassèrent pas sur la bouche, parce qu’il ne faut pas rêver non plus, mais rirent de concert pendant une heure trente, parce que, quand même, ils sont à se pisser dessus ces petits Franzosen. C’est d’ailleurs pour éviter ce type de déconvenues incontinentes que nombre de spectateurs circulèrent allègrement entre la salle et les commodités, séparées par une lourde porte qui grinçait comme une blague de Marcel Proust. Ou plutôt Gaspard (Proust), qui longtemps s’est levé de bonne heure mais nous laisse maintenant seuls à le faire.
Merci Pauline, Luc, Elisa, Caroline, Cédric pour ces superbes souvenirs, gentillesse, générosité, partage, éclats de rire, tendresse, bonté, talent, inspiration, humanité. Nous n’exagérons rien en écrivant que vous êtes inoubliables.
D’ailleurs nous n’exagérons rien, jamais.
A part peut-être l’histoire sur les costumes tyroliens.